Whiskey Irlandais : Le Spiritueux Roi de la Saint Patrick
Découvrez le whisky irlandais, son histoire et ses particularités. À déguster seul ou en cocktail, ce spiritueux est la boisson la plus consommée pour la Saint Patrick.
À la Saint-Patrick, le whiskey irlandais est roi!
Après avoir longtemps dominé le monde, le whiskey irlandais a bien failli disparaître. Mais d’après l’Irish Whiskey Association, depuis 2014, les ventes d’irish whiskey ont augmenté de 45 % pour atteindre plus d’un milliard de litres par an. Aujourd’hui, l’Irlande s’impose d’ailleurs comme le troisième producteur mondial de whisky. Un renouveau qui se fête à l’occasion de la Saint-Patrick.
Le 17 mars, partout dans le monde, on célèbre la Saint-Patrick, le saint patron le plus connu d'Irlande. Une date à laquelle la Guinness et l’irish whiskey coulent à flots. Il faut dire que s’il n’a pas inventé le whiskey contrairement à ce que l’on peut souvent lire, cet évangélisateur n’a pas seulement établi le christianisme en Irlande. Il aurait aussi introduit l'art de la distillation dans le pays en 432.
Un peu d’histoire
Le whisky est-il né en Écosse ou en Irlande ? Aujourd’hui encore, la question reste entière. Il semblerait toutefois que la plus ancienne trace écrite mentionnant une eau-de-vie élaborée à partir de céréales soit issue d’un ouvrage irlandais et remonte au XVe siècle. Une chose est sûre, au XIXe siècle, ce sont les Irlandais qui dominaient l’industrie du whisky. D’ailleurs, à cette époque-là, le pays comptait plus de cent cinquante distilleries et près de quatre cents marques. Mais, au début du XXIe siècle, il n’en restait plus que quatre en activité. Autant dire que l’irish whiskeyétait au plus mal.
Plusieurs facteurs expliquent le déclin du whiskey irlandais : l’instauration de la prohibition aux États-Unis en 1920, l’un de ses principaux marchés, la division de l’Irlande, le développement des ligues de tempérance et, bien sûr, le succès des blends écossais qui ont vu le jour grâce à l’invention du Coffey still. Ironie de l’histoire, c’est à un inspecteur général des agents de l’accise irlandais, Aeneas Coffey, que l’on doit la création de cet alambic permettant de distiller en continu de l’alcool de grain. Et si les Écossais l’ont très vite adopté, les Irlandais l’ont longtemps boudé…
Pour tenter de sauver l’industrie du whiskey irlandais, en 1966, Cork Distillers, John Jameson and Co et John Powers ont fusionné sous la bannière Irish Distillers. Un pari réussi ! Depuis, on assiste en effet à une véritable renaissance de l’irish whiskey. Ces dix dernières années, une quarantaine de nouvelles distilleries ont été construites et, pour faire face à la demande, les plus anciennes ont augmenté leurs capacités de production. Depuis 2015, la production de whiskey irlandais est même réglementée par une Indication Géographique Protégée.
Quelles sont les particularités du whiskey irlandais?
Le whiskey irlandais ne cultive pas uniquement sa différence en termes d’orthographe. Il se distingue avant tout grâce à son profil doux, fruité et épicé : un style très accessible. Il faut dire que si, comme leurs voisins écossais, les Irlandais produisent des single malts, des single grains et des blends, ils élaborent également des whiskeys pot still.
Spécialité irlandaise, les whiskeys pot still sont issus d’un mélange de céréales composé de 30 % d’orge maltée et 30 % d’orge non maltée minimum, associées à 5 % maximum d’autres céréales. La tradition des whiskeys pot still remonte à la fin du XIXe siècle lorsque la Couronne britannique a décidé de taxer l’orge maltée. Si l’ajout d’orge non maltée à leur « recette » contribue à la typicité de leurs whiskeys, il permettait avant tout aux distillateurs irlandais d’échapper à ce nouvel impôt.
Par ailleurs, s’ils peuvent être double distillés, traditionnellement, les whiskeys pot still sont triple distillés. De quoi leur apporter une plus grande fraîcheur. Quant aux alambics pot still, ils sont souvent de taille imposante en Irlande ce qui permet d’obtenir un distillat plus léger. Enfin, contrairement aux malts écossais, notamment ceux produits sur l’île d’Islay, les whiskeys irlandais sont rarement tourbés.
Le saviez-vous ?
Jameson est le whiskey irlandais le plus vendu dans le monde. Il est produit par la distillerie de Midleton, installée dans le comté de Cork et propriété de Pernod Ricard depuis 1988. Elle élabore également les whiskeys Redbreast, Powers, Midleton, ainsi que Green et Yellow Spot, et elle a investi 220 millions d'euros pour doubler sa capacité de production il y a une dizaine d’années. Tullamore Dew, qui appartient à William Grant & Sons depuis 2010, fait également partie des « irish best-sellers ».
Les Américains ne sont pas seulement de grands amateurs de whiskeys irlandais, ils sont également à la tête de distilleries irlandaises. Brown Forman a en effet racheté Slane Castle, au nord de Dublin, et fondé une nouvelle distillerie, sa première hors des États-Unis. Beam, racheté depuis par Suntory, s’est offert les distilleries Cooley et Kilbeggan. Quant à Sazerac, il a mis la main sur Paddy en 2016.
Si de nombreuses distilleries ont vu le jour en Irlande ces dernières années, le projet qui a véritablement créé l’événement est celui de Mark Reynier. Il faut dire qu’avec la construction de Waterford, l’ancien directeur de la distillerie écossaise Bruichladdich bouscule les codes de l’industrie du malt. Avec ses whiskies « single farm origin » (Waterford revendique élaborer des whiskies et non des whiskeys), qui sont la parfaite expression de la complexité d’un seul terroir, d’une seule ferme et d’une seule récolte, il a en effet remis l’orge au cœur du sujet.
Trois questions à Aurélie Panhelleux, co-fondatrice des bars à cocktails CopperBay installés à Paris (10e) et à Marseille.
Pourquoi le whiskey irlandais se prête bien à l'élaboration de cocktail ?
Le whiskey irlandais est un véritable spiritueux de dégustation, mais il a également sa place dans le monde du bar. Même s’il n’y a pas beaucoup de grands classiques élaborés à base de whiskey irlandais, son style inimitable fonctionne parfaitement en cocktails. Sa rondeur, mais aussi son côté légèrement épicé et très texturé apporte vraiment quelque chose en plus. Pour élaborer des cocktails, j’aime beaucoup utiliser Bushmill Black Bush ou Green Spot, qui font partie de mes irish whiskeys préférés.
Quels sont les secrets pour réussir un Irish Coffee ?
Ce cocktail, qui est un classique, a vu le jour en 1943. On le doit à un barman qui travaillait à l’aéroport de Shannon où l’on servait un cocktail à base de thé et de whiskey. Pour satisfaire ses clients américains, qui préféraient le « petit noir », il a remplacé le thé par du café. Chacun à sa recette de l’Irish Coffee, mais il y a tout de même quelques règles à respecter. La première, c’est de ne pas utiliser de la chantilly, mais une crème épaisse qui va apporter une légère acidité. Les températures sont importantes aussi. Si la crème doit être froide, le mélange whiskey-café-sucre doit être bien chaud.
Quels autres cocktails à base de whiskey irlandais peut-on facilement réaliser ?
Le Rory O’More, qui est un twist du Rob Roy, est très facile à réaliser. Il ne compte que trois ingrédients : du whiskey irlandais (6 cl), du vermouth rouge (3 cl) et un trait d’Angostura bitters. Plus simple encore, le high ball, que les Japonais appellent mizuwari et qui est parfait lorsqu’il fait chaud. On peut même le déguster facilement au cours d’un repas. Dans un grand verre à cocktail, il suffit de mettre des glaçons, du whiskey irlandais (5 cl) et d’allonger avec de l’eau gazeuse.
Cécile Fortis - Mars 2023